Derrière l’épais rideau dessiné sur la cou- verture d’And Who Sees the Mystery, Gilles Aubry cache une nouvelle composition faite de sons glanés en voyage – cette fois au Maroc, qu’il a sillonné en 2013 et 2014 avec Zouheir Atbane. C’est donc, après ceux de The Amplifications of Souls et Les écoutis Le Caire, une autre impression d’Afrique qu’il livre sur vinyle. 112 Aubry, c’est d’abord une oreille à l’affût, celle d’un voyageur qui cherche à découvrir ce qu’un paysage pourrait bien avoir à lui dire par les sons qui font son quotidien ; ensuite, ce sont des preuves d’une réalité à réinventer comme à distance, qui prendront les atours d’une abstraction à énigmes. Si elle révèle quelques constantes (feedbacks et sifflements d’origine électronique, présences d’animaux et de mécaniques, irruption d’un air de folk- lore…), la pratique sonore du Suisse ne lasse pas de surprendre: ici, au son d’instruments singuliers (voix, flûtes, cordes, percussions… qu’agitent des musiciens dont les notes de pochette donnent les noms) ; là, sous les ef- fets de « halos » (d’enveloppes, presque) qui accompagnent la sélection de témoignages plus tôt saisis par les micros. Alors, dans le même temps qu’il donne l’impression – peut-être n’est-ce qu’une im- pression, une fausse idée voire un fantasme d’auditeur n’ayant pas fait le voyage, en tout cas pas ce voyage-là – d’avoir traîné en ate- lier ou approché une fantasia, le musicien brouille les pistes (puisqu’il il s’agit bien ici de re-recording) et enrichit les nouveaux usages que l’on peut faire du monde – pour évoquer un de ses compatriotes, Nicolas Bouvier, qui voyagea beaucoup équipé de son Nagra. De sa nouvelle errance, Gilles Aubry a ainsi fait deux (sur)faces pleines et ravissantes. [gb]
Re√iew: AND WHO SEES THE MYSTERY in “Le Son Du Grisli”
Derrière l’épais rideau dessiné sur la cou- verture d’And Who Sees the Mystery, Gilles Aubry cache une nouvelle composition
faite de sons glanés en voyage – cette fois au Maroc, qu’il a sillonné en 2013 et 2014 avec Zouheir Atbane. C’est donc, après ceux de The Amplifications of Souls et Les écoutis Le Caire, une autre impression d’Afrique qu’il livre sur vinyle.
112
Aubry, c’est d’abord une oreille à l’affût, celle d’un voyageur qui cherche à découvrir ce qu’un paysage pourrait bien avoir à lui dire par les sons qui font son quotidien ; ensuite, ce sont des preuves d’une réalité à réinventer comme à distance, qui prendront les atours d’une abstraction à énigmes. Si elle révèle quelques constantes (feedbacks et sifflements d’origine électronique, présences d’animaux et de mécaniques, irruption d’un air de folk- lore…), la pratique sonore du Suisse ne lasse pas de surprendre: ici, au son d’instruments singuliers (voix, flûtes, cordes, percussions… qu’agitent des musiciens dont les notes de pochette donnent les noms) ; là, sous les ef- fets de « halos » (d’enveloppes, presque) qui accompagnent la sélection de témoignages plus tôt saisis par les micros.
Alors, dans le même temps qu’il donne l’impression – peut-être n’est-ce qu’une im- pression, une fausse idée voire un fantasme d’auditeur n’ayant pas fait le voyage, en tout cas pas ce voyage-là – d’avoir traîné en ate- lier ou approché une fantasia, le musicien brouille les pistes (puisqu’il il s’agit bien ici de re-recording) et enrichit les nouveaux usages que l’on peut faire du monde – pour évoquer un de ses compatriotes, Nicolas Bouvier, qui voyagea beaucoup équipé de son Nagra. De sa nouvelle errance, Gilles Aubry a ainsi fait deux (sur)faces pleines et ravissantes. [gb]